Mail adressé ce 13 février à la rédaction de France-Inter (à quelques modifications près)
Vers 8h20, 13 février 2023 : Réveillons-nous !
Sébastien Chenu, RN, interviewé par Lea Salamé et Nicolas Demorand, sur France-inter, au sujet des retraites.
Arrive dans l’échange, très policé, la question de la natalité, et de la préférence nationale que ce parti souhaiterait promouvoir.
Je cite Sébastien Chenu
« je préfère qu’on fabrique des travailleurs français plutôt qu’on les importe »
Et qq instants plus tard
« nous considérons que fabriquer des travailleurs français de demain, eh bien, il faut aider les familles françaises pour cela »
Au-delà de la préférence nationale que ce parti veut imposer, vieille référence raciste que l’extrême droite véhicule depuis des décennies si ce n’est des siècles, et qui n’a pas grand intérêt, c’est la formulation employée qui est absolument terrifiante, les mots ayant un sens.
La question de la natalité, c’est-à-dire de la mise au monde d’êtres sensibles, doués de raison et de libre arbitre, est réduite et assimilée à une fabrication, mot tiré du registre de la technologie et de la production d’OBJETS inertes, sans affect, destinés à la satisfaction des besoins de l’espèce supposée évoluée que nous sommes. Le mot importation, est lui aussi tiré du même registre, et il renvoie à ces marchandises entassées par milliards dans les porte-conteneurs qui sillonnent la planète…
Donc ces OBJETS humains, seront destinés à devenir des travailleurs de demain, totalement chosifiés, aliénés à leur tâche de travailleurs, au service des intérêts d’une économie, Française, évidemment.
Quant à vous, Mesdames, putains ou poules pondeuses, c’est selon, je suis certain que vous apprécierez beaucoup d’être élevées au rang de machines productives d’objets : votre promotion est remarquable !
Derrière ces formulations banales, que personne ne relève (et pas les journalistes pourtant perspicaces de la station), se cache la réalité obscène du monde du travail d’aujourd’hui, celle d’une totale déshumanisation, amplifiée par les algorithmes, et auxquels sont déjà soumis des dizaines de millions de travailleurs chinois, indiens, pakistanais, qui travaillent dans des conditions quasi carcérales à produire le nécessaire électronique à notre asservissement.Pour l’engraissement de gigantesques puissances financières sur lesquelles, bien que ce ne soit jamais dit, sont adossées depuis toujours les extrêmes droites, qui ont besoin de main d’œuvre serviles.
Cette banalisation en dit très long sur le degré de balkanisation des esprits auquel nous sommes parvenus. Ce sujet des retraites, certes important, agite l’agora et focalise l’attention tandis que des puissantes capitalistiques gigantesques tirent d’autant plus tranquillement les ficelles, tendent à construire pour demain un monde totalement Orwellien, et totalitaire, déniant aux hommes que nous sommes l’essence même de notre dignité, celle de faire des choix libres.
Et hélas, ces glissements sémantiques dépassent très largement la zone d’influence de l’orateur concerné. Ils ont été mis en place par des décennies de petits renoncements individuels où l’on a accepté, par paresse intellectuelle, de ne pas remettre à sa place ce qui aurait du l’être, à savoir le respect de la vie dans ses dimensions humanistes. Maintenant, nous sommes au bord de la falaise, qui est elle-même menacée par le dérèglement climatique induit lui aussi par ces renoncements. Elle se dérobe sous nos pieds par pans entiers.
Qui s’en émeut ?
Peut-être un(e) des brillant(e)s choniqueurs(euses) de la station pourrait-il tacler vigoureusement ces propos et ces dérives mortifères ? Votre station à laquelle j’ai été biberonné (j’ai 64 ans) s’en trouverait indubitablement grandie, et bien dans son rôle de service public.
Bien cordialement